Demain petit toi aussi tu seras grand

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Il y a quelques années de cela, la mode était aux belles voitures et à la cravate, à l’homme dynamique et à la fille rebelle. Génération 2.0 et indépendance politique aux mains de citoyens toujours plus désireux de faire la différence sur la table des décisions, et pour l’homme moderne de base, c’est l’accès à la propriété plus jeune qui devient le succédané d’une vie aux mains de financiers toujours plus gourmands. 

 Société d’indépendance et d’intendance ; il est là le temps de la réunion et des ambitions professionnelles. Mais pour l’industrie du sport et du fitness, le jeu est bien différent. Une industrie qui a compris qu’en 2000, après avoir trop fumé ou trop picolé, on se reprends en main; plus que nos parents l’on jamais fait. Moi de croire qu’un boulot à la  chaîne ne laisse peu de place pour sa propre santé.

Et parce que notre confort de vie accroît avec notre conscience sociale et politique, on se retrouve alors plus enclins à payer plus pour mieux manger, mieux s’habiller…mais surtout mieux (re)prendre sa santé en main.

Fini le travail pénible et fini une soumission bien trop avilissante en la terre ronde, il est venu le temps de la forme.

L’industrie du « fitness » dans tout ça ? Et bien un secteur en pleine forme qui nous vends des vêtements « sport », des boissons chargées aux électrolytes et des bancs de musculation toujours plus sexy. Cette nouvelle tendance est plus que jamais l’occasion rêvée de vendre une nouvelle image ; comme cela a toujours été le cas au fil de notre histoire.

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Après que l’on ait demandé à madame de préparer le dîner pendant que monsieur rentrait du charbon, on la retrouvera quelques années plus tard détachée du mariage, en nouvelle homosexuelle, plus que jamais fière de se réclamer de son existence.

25 ans plus tard; le monde de la mode et de l’anorexie. Des mannequins et des danseuses prêtes à tout pour défiler ou figurer dans le casting d’un metteur en scène réputé. Des modèles réduit à des objets, et une image que l’on nous vends. Du rêve, du rêve et encore du rêve. Et toi dans tout ça ?

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Toujours plus désireux de créer du fantasme, les filles un peu rondes deviennent dangereusement fines, et le respectable patriarche cède sa place au beau gosse rebelle. L’image est un business juteux, que l’on retrouve en rêve packagé dans un parfum, une paire de chaussure ou un rouge à lèvres ; et l’histoire se répète, notre chère industrie du « fitness » n’y figure pas en exception. 

La santé, c’est le nouveau fer de lance pour des vendeurs de compléments alimentaires, et des milliards d’euros pour cette industrie : Shakers, repas hyperprotéinés, t-shirts respirants et baskets farfelues mais « performantes même par -15 ». Et qui retrouve-t-on encore une fois, digne impératrice de la santé 2.0 : la femme ; encore et toujours. 

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Hélas, ces nouvelles femmes plus indépendantes, et fières de faire du sport, et qui aspirent à suivre de belles athlètes aussi impressionnantes par la carrure que par la performance mettent en exergue quelque chose qui bloque : Photoshop ? Stéroïdes ? Sexisme ? Mensonges ?

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Oui, des appareils sur lesquels tous ferment les yeux : on ne demande plus au filles d’être fines, mais on veut les abdos ou les quadriceps en prime. Non, l’industrie du fitness n’est pas que coton et ribambelle, c’est surtout de l’argent (et non du moindre : plus de 10 milliards de dollars en 2008 pour cette industrie aux US) et une femme objet, jetée en pâture à l’industrie de consommation en mal d’opulence.

Pire encore ; parce que c’est la porte ouverte aux troubles des comportements alimentaires pour des gymalcooliques qui ont peur de devenir trop gros, et qui sont prêts à tout pour avoir des abdominaux visibles.

Fini les croissants du matin, « c’est trop gras ». Et quelle image, que celle que l’on nous vends, qui associe sport et réussite, performance et résultats ?

Culte de la musculation, de l’endurance et de la définition musculaire, Blandine cède alors sa place au jeune homme fin, ou la fille un peu trop maigrichonne, tout le monde veut devenir fort et musclé.

A entendre l’industrie du fitness, toi aussi tu es un pro. L-carnitine avant, BCAA après, un shaker et au lit….demain petit toi aussi tu seras grand.

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Du rêve, voilà ce que l’on nous vends, du rêve qui a su manipuler l’épidémie d’obésité qui sévit dans le monde et qui prends l’apparence d’un énième complément alimentaire toujours plus efficace pour brûler la graisse, développer 10 kilos de muscles et nous transformer. Vraiment, il n’y a que ça…tous les modèles que l’on voit vivent de leur image ; et qu’est-ce qui leur empêche alors de ne pas se livrer aux extrêmes ?

Mais cette tendance est plus pernicieuse, parce qu’en plus de présenter un écran de fumée, elle est aussi le vecteur à un rabaissement constant de la personnalité. Il n’est en effet pas rare de voir sur internet des images d’athlètes (la plupart fins gourmets envers les stéroïdes anabolisants) à côté desquels une texte en gras annonçant que « si tu ne transpires pas, si tu ne souffres pas, alors tu n’a pas fait de ton mieux. »

Merci du conseil, me voilà donc trop gros et trop fainéant pour le 6% de masse grasse. 

Je crois personnellement au principe bouddhique d’ Ahimsā qui est un principe de non-violence, mais je crois aussi qu’il s’applique envers soi-même, et j’ai la sensation que cette manie y est aux antipodes. C’est parce que nous sommes dans des sociétés d’extrême qu’en belle inconnue, la modération se fait silencieuse. Pour la personne souhaitant reprendre sa santé et son physique en main ; il peut être déroutant de comprendre que tout est noir ou blanc.

Marcher un peu ne suffit plus ; il faut également s’entraîner en salle, s’étirer, faire un peu de course à pied ou un autre sport, « bien » manger, et « bien » dormir. Mais à l’image de tymos et epithymia pour Platon, santé physique et santé mentale vont de pair. Moi de croire que cette dernière s’en trouve alors réduite à peau de chagrin…

Comment aller bien quand l’on se retrouve prisonnier d’un monde qui ne cessera de répéter qu’il faut manger des protéines pour ne pas finir dans la caste des loosers ?

Comment considérer ce qui se passe ?

Quelle approche pour mieux cerner les modèles à suivre et à appliquer pour soi-même ?

Pour cela, Il faut garder en tête que ce que l’on voit ne reflète pas la réalité. Une image manipulée et mani-pu(l)ante, ce sont potentiellement des milliers de personnes qui agrémenteront leurs journées avec un énième complément alimentaire. 

Il faut également être au fait des limites physiologiques humaines ; il est en effet assez rare d’être TRES sec, TRES musclé, et TRES en forme.

En effet, la santé hormonale est souvent inversement proportionnelle à son taux de masse grasse.

Musclé ? Oui mais déshydraté, chargé aux anabolisants, hormones de croissances et insuline...
Musclé ? Oui mais déshydraté, chargé aux anabolisants, hormones de croissances et insuline…

 

Alors, ce choix que l’on fait, nécessite quand même un recul ; et comprendre qu’avant d’aspirer à devenir comme lui, il reste quand même une belle marge de progression : celle se se sensibiliser à l’importance de sa nutrition ; comprendre que l’on peut se faire plaisir tous les jours sans aucune conséquence néfaste ; ou encore que prendre du muscle c’est bien, mais il est inutile de croire que vous serez comme « eux ». « Eux » ce sont des modèles payés pour nous faire rêver, et souvent en moins bonne santé qu’on le pense.

Je me souviens d’une phrase, dans un reportage « être en santé…j’en m’en fous. Je fais ça pour l’image »  – Une bodybuildeuse professionnelle.

Mais, pris dans l’autre sens, cela veut aussi dire qu’il est possible d’avoir de très bons résultats avec de la motivation et de la patience. La vie est une danse, est apprendre à danser s’impose comme une nécessité – et ce parce que l’ignorance est un bien trop lourd forfait.

 En conclusion, cette nouvelle tendance est aussi un modèle qui a ses limites et qui appelle à la réflexion. Il s’agit avant tout de mieux comprendre et cerner les intentions de cette industrie, définitivement plus intéressée par votre besace que par la taille de vos biceps ; et elle se dote de tous les atouts pour y parvenir : sexisme, rabaissement de la femme, mensonges, et hypocrisie.

La stratégie n’est pas nouvelle mais, plus que jamais, sous son apparence douce se câche un loup.

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Elle lui dit : Ma mère-grand, que vous avez de grands bras ? Je passe beaucoup de temps en salle, ma fille.


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